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mardi, 19 février 2019

Polémique: rebellocrates et sans-calottes

«Le Verbe publie cette semaine un billet qui, au premier abord, semblera déroger de la ligne éditoriale que nous nous efforçons de suivre depuis quelques années: annoncer davantage que dénoncer», explique Antoine Malenfant, rédacteur en chef du magazine.

Il fait référence au récent billet du chroniqueur Alex La Salle qui s’en prend aux idées du théologien Jocelyn Girard publiées dans deux médias indépendants, Le Quotidien de Chicoutimi et l’agence de presse Présence.

Alex La Salle voit poindre, dans les thèses de ce professeur de l’Institut de formation théologique et pastorale qui est aussi un collaborateur auprès de plusieurs revues membres de l’AMéCO, «ce pestilentiel esprit d’aversion et même d’exécration pour tout ce qui rappelle la verticalité, la hiérarchie et l’autorité en Église». Il reproche au texte publié par Présence de détailler «une sorte de plan de réforme d’inspiration bolchévique passant par la prêtrise pour tous, le mariage des ministres consacrés, mais surtout la prise du Palais d’hiver par les laïcs».

Le chroniqueur Girard a répliqué à l’auteur dans un long commentaire publié par Le Verbe. Il lui reproche d’être incapable d’émettre une idée «sans une injure que vous saupoudrez abondamment avec la prétention de pouvoir comprendre les idées que je défends, laissant vos lecteurs apprécier l’étendue de votre éloquence et plus encore de votre mépris».

Antoine Malenfant défend aujourd’hui le chroniqueur du Verbe, expliquant qu’«un nombre désolant de prises de position publiques par des tribuns à l’anticonformisme autoproclamé circule depuis un bout dans le (très) petit milieu catholique québécois. Il y a des moments pour se taire et pour laisser passer. Il y en a d’autres où, au lieu de hurler Joual-vert! Ça suffit! dans les corridors du bureau, on prend la plume.»

Il est rare, dans l’histoire de l’AMéCO, de voir des rédacteurs de publications s’en prendre à des chroniqueurs associés à d’autres membres de l’association. En 2009, le chroniqueur Luc Phaneuf avait écrit que Le Nic, ancêtre du magazine Le Verbe, «est le seul organe de presse – laïc de surcroît! – qui soit demeuré vraiment catholique au Québec», ce qui avait irrité un grand nombre de membres et de dirigeants de l’AMéCO, dont la présidente de l’époque, Gaëtane Larose. L’année précédente, toujours dans Le Nic, le chroniqueur André Chevalier s’en prenait au «médiocre Prions en Église» et invitait paroisses et individus à s’y désabonner.

Commentaires

  • louis Arnout 17 juin 2019

    Onil, vous êtes probablement né dans les années 30 donc de la « génération défroquée » (livre de F. Charles). Et défroqué au pire moment, autour de 70…
    L’abolition du clergé n’est rien d’autre que du protestantisme, et l’effet caste sociologique n’est qu’une conséquence secondaire des ordres sacrés, qui doivent être considérés d’un point de vue beaucoup plus profond et élevé.
    Non, le plus urgent c’est la disparition de la « génération défroquée » déboussollée par les 60s, et de son « héritage » , dont plus personne n’a besoin.

  • Onil Perrier 24 février 2019

    Moi aussi, je suis choqué et même enragé de voir ce que la rencontre de Rome nous révèle ces jours-ci. Enragé parce qu’on fait quatre pas, qui sont nécessaires, oui : on écoute les victimes, on demande pardon, on se prépare à payer, on va mieux former les séminaristes… Mais on oublie le cinquième, le plus urgent que Jésus lui-même ferait et que le pape François a le goût de faire : abolir le clergé en tant que tel (« formaliter ut sic » comme on disait en latin) pour faire du sacrement de l’ordre un multiplicateur de PASTEURS (et de PASTEURES) et non un adoubement qui fait entrer dans une CASTE de privilégiés des mâles célibataires, qui… se croient tout permis.

    J’ai vécu la chose car j’ai été 20 ans dans le clergé (1952 à 1972). Le concile, mes expériences de communautés de base, mes lectures, mes rencontres… tout cela m’a convaincu que Jésus ne voulait pas de clergé mais des pasteurs ! Alors j’en suis sorti et j’ai vécu depuis comme un vulgaire laïc !

    J’explique mes convictions dans une brochure de 36 pages « Une aventure extrême dans la foi, la communauté de base » que je ferai parvenir gratuitement en PDF à ceux qui en feront la demande.

    Onil Perrier, 91 ans. [email protected].

  • Antoine Malenfant 21 février 2019

    Bonjour Jonathan,

    Je te remercie pour les bons mots. Et merci aussi d’avoir pris le temps d’écrire un commentaire.

    Évidemment, nous ne nous attendions pas à une pluie d’éloges en réponse à la publication de ce texte. J’accepte et j’assume la responsabilité qui découle de sa mise en ligne. Nous savions qu’il dérangerait.
    Si j’ai pris la décision de le publier, c’est que ce « crachat amphigourique » est dirigé vers des idées et des positions qu’Alex juge néfastes. En aucun lieu les critiques ne sont tournées vers la personne.

    Si je n’ai qu’un regret, c’est celui de n’avoir souligné que les idées mises de l’avant par M. Girard, donnant l’impression qu’Alex les prend pour unique cible, même s’il mentionne clairement qu’il s’agit d’un exemple, d’une étude de cas, pour illustrer un phénomène qui va bien au-delà des seules chroniques du professeur de théologie.

    Est-ce que la rébellion de ce que Jocelyn Girard nomme lui-même un « courant de fond » (en commentaire sous l’article d’Alex) est un « enjeu inventé de toutes pièces » par l’auteur – qui, par ailleurs, travaille en pastorale paroissiale depuis des années? Il faudrait s’entendre là-dessus : est-ce inventé ou est-ce un courant de fond?

    Est-ce un « monologue » plein de « généralisation »? Pour un monologue, je trouve qu’il a quand même suscité, à ce jour, pas mal de discussions et d’échanges. Si ce sont des « généralisations », il faut croire qu’elles touchaient à des points assez précis pour entrainer quelques réactions…

    Enfin, quant à ma tâche de rédacteur en chef, j’essaie de m’en acquitter le plus humblement possible. Ce qui est une maladresse aux yeux de certains sera considéré comme un bon coup par les autres. Et le lendemain, c’est exactement l’inverse qui arrive.

    Je ne cherche pas à « guérir » qui que ce soit. Ce texte aurait certainement pu être plus gentil. Mais le « ressentiment » qui semble s’en dégager témoigne, je crois, d’une exaspération bien présente chez plusieurs croyants qu’il serait bien malcommode de minimiser.

    Ce sera toujours un plaisir et un honneur – je l’écris sincèrement – de discuter avec toi. Et je prie pour que nos désaccords deviennent des occasions d’une fraternité toujours plus vraie.

    À bientôt, j’espère!
    Antoine

  • Jonathan Guilbault 20 février 2019

    En tant que tel, je trouve tout à fait approprié qu’Antoine défende son chroniqueur, et la ligne éditoriale de la revue qu’il dirige avec brio.
    Par contre, sur le fond, c’est-à-dire sur le caractère opportun du billet d’Alex La Salle, j’ai de sérieuses réserves moi aussi.
    Le papier pamphlétaire d’Alex est un crachat amphigourique bien plus que « l’annonce d’une bonne nouvelle », pour reprendre l’expression d’Antoine dans son billet d’aujourd’hui. Il faut beaucoup d’imagination pour y voir une chronique conforme à la ligne éditoriale du Verbe. Et vraiment tout un troupeau de licornes dans les yeux pour considérer qu’il sert la réflexion et le débat. Car « abyssus abyssum invocat », l’abîme appelle l’abîme, et même s’il avait raison (mais sur quel enjeu réel ? On peine à en identifier un dans le texte d’Alex, sauf celui qu’il fabrique de toutes pièces), les personnes qui ne pensent pas comme lui n’auront assurément pas le réflexe de prêter l’oreille à ce monologue plein de ressentiment, de mauvaise foi et de généralisations.
    Rien de plus tristement conformiste et, ironiquement, typique de notre époque, qu’une telle prise de parole fielleuse (celle d’Alex). Les réseaux sociaux sont remplis de trolls. La vraie bonne nouvelle serait qu’une telle intelligence (toujours celle d’Alex) soit mise au service de l’expression d’une pensée conservatrice (au sens noble du terme) consistante et vraiment capable d’intégrer les enjeux et signes de notre temps. Voilà seulement ce qui pourrait peut-être – sait-on jamais ! – me guérir de mon indécrottable « conformisme progressiste ». Et voilà pour Antoine un beau défi de rédacteur en chef.

  • René Tessier 20 février 2019

    Cela fait plusieurs fois que je suis amené à lire notre ami Alex La Salle; chaque fois je suis porté à le trouver en même temps génial et imbuvable. Génial parce qu’il est incontestablement très intelligent (ce que Jocelyn Girard semble lui reconnaître d’emblée) et que son style écrit est impressionnant; mais imbuvable parce que nettement excessif, hyper-alarmiste et qu’il nous livre chaque fois des textes marqués au coin de la totale désespérance. L’Église est en crise; pour ceux et celles d’entre nous qui suivent un peu l’actualité, mon cher Alex, c’est une évidence. Ces jours-ci, les reportages qui nous dénoncent ou relèvent un très profond malaise sont partout, je dois être rendu à 200 seulement dans la dernière semaine! Alors, avons-nous vraiment besoin d’entendre crier au loup un homme féru d’histoire, aux riches allégories, mais qui n’offre jamais la moindre piste de sortie ou le moindre rayon d’espoir ? Bien entendu, chacun peut s’exprimer librement à sa guise mais si, pour changer, nous essayions, de part et d’autre, de faire oeuvre utile ?
    Que les laïcs « prennent d’assaut le Palais d’hiver » (référence absconse à la Révolution russe de 1917?), qu’ils se ruent même sur le Vatican, ce serait peut-être une bonne chose, c’est du reste un peu ce que désirent le pape François et la grande majorité des cardinaux. Notre Église doit de toute urgence se dégager du cléricalisme, la plupart de mes confrères prêtres l’appellent de leurs vœux. Alors, passées les insultes et le mépris, travaillons ensemble à bâtir une meilleure Église, qui s’adapte au monde dans lequel elle vie sans jamais taire le message de l’Évangile… C’est la grâce que je nous souhaite. René Tessier, Revue Pastorale-Québec

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